10nov. 2010

Le monde est petit #3 - Que dit le monde ?

Ultime épisode de ce polar-geek. Ultime et douloureux : presque un an pour l'écrire...

Je devais avoir "réellement" accès à leur système d'information. J'étais maintenant persuadé que l'on maintenait devant nous un mirage...

Comme tous les matins, je suis parti en trolley. C'était bien, ça me donnait le temps de réfléchir. En voiture, que je n'ai plus, il est impossible de se concentrer sur autre chose que cette foutue conduite. Dommage pour moi, ce matin précisément les autres passagers faisaient un tel brouhaha, que j'ai fini par prêter attention à leur discussion. Apparemment, l'explosion de l'aérogare avait été suivi d'un étrange évènement. Tout le monde parlait du Père Noël et du fait qu'on l'avait vu dans le ciel, sur son traineau, s'éloignant du lieu de la catastrophe. Abasourdi devant tant d'incrédulité, je me suis mis en quête d'un quotidien. Les gros titre disaient : "Un visiteur en traineau volant lié à l'attentat de Sá-Carneiro !". Les témoins décrivaient la vision d'un géant à la barbe blanche, juché sur un traineau et tiré par des rennes. En prime, celui-ci aurait empoigné un marteau et dans un fracas du tonnerre, aurait détruit le terminal.

Vous savez à quoi on reconnait un fou ? Il pense que tous les autres le sont mais pas lui... Vous croyez que je suis fou ?

J'ai fait une grosse boulette avec le journal. La boulette devait ressembler à une salade; une grosse vache montée par son propriétaire est venue la manger.

Arrivé au siège de Virtec, je devais mettre la main sur Paki. Il fallait qu'il m'aide. Mais personne. Ou plutôt si, plein de monde. Dans tous les sens. J'ai alpagué au passage une tête qui me disait quelque chose, un responsable d'un autre privé comme moi. Il semblait complètement paniqué et m'a simplement dis de rentrer chez moi. Qu'il n'y avait plus rien à faire. Comme un chirurgien qui vient vous annoncer que l'opération a raté et qu'il a fallu déclarer la mort du patient.

Non, non, non, ça n'allait pas se passer aussi simplement. Il me fallait un accès. De retour dans mon bureau vide, j'ai fermé la porte. Et j'ai fouillé, fouillé. Les affaires de Paki, son compte, ses mails. Et j'ai trouvé. Un mot : gergelim ! Pour la passe, ça serait une autre affaire.

Au cours de mes pérégrinations dans les locaux de Virtec, j'avais repéré une grosse incohérence dans la construction du bâtiment. Encore un mirage. Salomon aurait apprécié. Le temple était bien caché. Est-ce là que je devais aller ? Si je ne pouvais atteindre ce lieu de manière physique, peut-être le pourrais-je de façon dématérialisé ? Quand je me suis penché sur mon poste de travail, le temps s'est comme figé. Moi, là, immobile, les autres, dehors, à courir de plus en plus vite, comme une fourmilière qui sait qu'elle est condamnée.

Comment crever le paravent, aller au delà de ce SGI si...parfait ? Une idée, vite ! Pourquoi ne pas tenter de repérer des protocoles exotiques ? Je pressentais que dans la panique, "ils" avaient baissé la garde. Et qu'avaient du apparaître des nouveautés. Il fallait s'engouffrer dans la faille.

Presque bingo. Il transitait d'infimes bribes de données; que je qualifierais de brutes tellement elles ne correspondaient à rien, vraiment ! Après un temps insoupçonnable, un schéma ressortit. Et me rappela ce sur quoi je travaillais avec Paki. Je l'avais vu donner à mouliner ces données sur sa station.

Plus de Paki, plus de surveillance, plus de règles ou d'autorisations. Une recherche dans l'historique des applications exécutées et me voilà en train de nourrir une machine avec des données autrement plus exotiques qu'une vahiné chez les manchots.

Soudain, est apparu sur l'écran le schéma d'un réseau, enfin, plus qu'un réseau. Une structure, Une infrastructure. Comment dire.... J'eus la preuve que le bâtiment recélait en son sein, une structure cachée. Mais cette structure était bien plus que cela. Comme si c'était un réseau à part entière. Cette structure semblait connectée à un réseau jumeau mais "ailleurs"... Et tout ce bazar devait aller très mal. Sinon pourquoi la majorité des items du schéma seraient rouges, de celui qui veut dire "casse-toi !" ? Mais bon, vous savez ce que c'est la curiosité. Je venais de mettre la main sur un truc complètement dingue. Mieux que le Père Noël qui explose un aéroport ! Grâce au schéma, je savais comment me rendre dans cette structure. Grâce au sésame aussi.

Vous connaissez la légende du Graal ? On prétend que celui qui regarde dans le calice sacré découvre tous les mystères de Dieu et de la vie mais qu'il meurt aussitôt. Et bien, c'est ce qui m'est arrivé lorsque j'ai pénétré la structure. Je ne suis pas mort parce que je vous raconte cette histoire mais c'est pour bientôt. Ce que j'ai découvert ? Bah, de toute façon, notre sort à tous en est jeté...

Et bien, tout d'abord, laissez-moi vous dire que notre monde n'existe pas. Pas vraiment. Ce n'est qu'une simulation. De génie, j'en conviens. Une simulation numérique d'un monde jumeau. Pourquoi ? Je ne sais pas. Des expériences sur des cobayes virtuels, hein ? Peut-être que le temps passe plus vite ici que là-bas, pour voir ce que devient la société. On s'en fiche...

Ce qu'il faut savoir, c'est que la structure étrange qui réside au sein du bâtiment de Virtec sert de connexion avec l'autre monde. Il y a eu de sérieux problèmes techniques et craignant la rupture, de gros moyens ont été mis en œuvre pour réparer. Ces moyens comprenait l'embauche côté virtuel de toutes les "bonnes volontés", comme votre serviteur. Et alors ? On est virtuels, on s'en fout, on vit ? Déjà, comme nouvelle, ça rétame. Pire que de boire de la cachaça.

Mais bon, hein, la rupture, elle a vraiment eu lieu. Faut voir toutes les incohérences et bizarreries survenues ces derniers jours. Pourquoi ils s'affolent les gars là-haut ? Parce qu'ils savent, comme moi, que notre monde est condamné. Je vais disparaitre, vous aussi ! Le Graal !

Voilà, j'étais bien avancé. Je connaissais la véritable essence de mon monde. Et celui-ci était en train de mourir. Il ne me restait plus qu'à m'allonger et à m'endormir. Du sommeil du juste. Après tout, n'avais-je pas résolu l'énigme ?

Merci à Beth Orton de m'avoir supporté et soutenu pendant ces dernières heures d'écriture.

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2 commentaires

1. Le mardi, novembre 16 2010, 15:46 par dsp

La (en)fin de cette histoire me fait penser à deux choses:

  • les pathétiques malheureux protagonistes (méchants comme héros) du film "passé virtuel" qui essaient à tout prix de s'échapper de leur monde virtuel
  • une idée de suite : le héros se réveille à la suite du cuite sévère à la cachaça. Le cauchemar n'a fait que révéler de manière inconsciente des éléments épars qui permettront au héros de résoudre le problème
2. Le mercredi, novembre 17 2010, 10:40 par Wosh

T'as raison. Le concept du film "Passé Virtuel" est le germe de cette nouvelle. Après, la plus grosse référence est pour Douglas Adams dans sa période holistique.